« – Allo ? Je m’appelle…
– Tu t’appelles comment ?
– Pas comment ! Je m’appelle, c’est tout.
– Je ne comprends pas.
– Mais si ! Je m’appelle parce que j’ai perdu mon portable.
– Perdu…
– Ou on me l’a volé. Qui es-tu, d’ailleurs ?
– Je suis « on »… »
Chloé réussira-t-elle à récupérer son portable, trouvé par Salomon dans le métro ? Voici leurs conversations téléphoniques ainsi que celles de leur famille et amis, qui tous se mêlent de cette histoire et de leur relation naissante.
L’heure c’est l’heure. Et vous n’y êtes pas, mais alors, pas du tout. Dans la classe, tout le monde est déjà au travail ou endormi, le prof en train de pérorer, les contrôles distribués, les consignes expliquées. Vous en êtes malade d’avoir raté ça ! Ces 10, 20, 40, 54 minutes de cours vont terriblement vous manquer. Vous ne vous en consolerez jamais. Dans les couloirs déserts vous courez ventre à terre, couvert de sueur et tout confus, ouvrez à la volée la porte de la salle en sanglotant et balbutiez que, si vous êtes en retard, c’est parce que…
… je n’osais pas entrer. … le vent m’a emporté. … j’aime me faire désirer… Je vous ai manqué ? … il est 8h20, déjà ? C’est fou comme le temps passe… … mon vernis n’était pas sec. … j’étais à la recherche du temps perdu. Et vous savez quoi ? Je ne l’ai toujours pas retrouvé, monsieur Proust. … mon vélo est tombé en panne d’essence. … je suis à des années-lumière du collège. … sur la route j’ai vu un panneau marqué « école, ralentir », alors j’ai obéi. C’est important de respecter le code de la route.
« – Allo ? Je m’appelle…
– Tu t’appelles comment ?
– Pas comment ! Je m’appelle, c’est tout.
– Je ne comprends pas.
– Mais si ! Je m’appelle parce que j’ai perdu mon portable.
– Perdu…
– Ou on me l’a volé. Qui es-tu, d’ailleurs ?
– Je suis « on »… »
« Viola travaillait son violon pendant des heures. Les exercices et les morceaux que monsieur Setin lui donnait, et puis aussi les airs qui lui venaient tout seuls, de plus en plus souvent, de plus en plus jolis. Vers sept heures sa mère tambourinait à sa porte, parce que les devoirs n’étaient pas faits, et le dîner pas prêt, « et par pitié arrête ce bruit, ça me rend folle ! ». Alors Viola soupirait, reposait tendrement son violon dans son étui de velours, puis elle bâclait ses devoirs et picorait son dîner. Mais quand elle se couchait, elle se sentait bien, elle se sentait belle et riche et grande. Elle rêvait de notes, qui lui faisaient comme une traîne. La nuit elle jouait encore, et le monde entier l’écoutait. »
« Je n’ai pas mis longtemps à comprendre que la question « who are you ? » signifie « qui es-tu ? ». J’ai aussi saisi qu’il faut répondre en donnant son nom, précédé d’un cri de douleur (aïe) suivi d’un meuglement (meuh) : I’m. Fébrilement, je répète dans ma tête : « I’m Fatoumata, I’m Fatoumata . » Ce n’est pas très difficile. N’empêche, je suis terrorisée à l’idée de devoir pour la première fois de ma vie parler anglais, et en plus devant tous ces inconnus très savants… et très moqueurs.Mon Dieu, ça va être mon tour ! Morte de peur, je vois la professeur se camper devant ma table en me lançant son effrayant « who are you ? ». J’ouvre la bouche et balbutie d’une voix tremblante :–I’m… Fat… et puis je m’arrête, la gorge serrée, à bout de forces et de salive.–Fat ? répète Mrs Fox avec un grand sourire. Pourtant, tu n’as pas l’air si fat que ça… »